La façade principale mesure 220 mètres. Aux deux
extrémités s'élèvent
deux tours carrées et au milieu se dresse Ia basilique, qui est un
parfait exemplaire de l'italianisme grandiose et pompeux de Michel Ange,
remarquable par I'harmonie de ses proportions et de ses couleurs, comme
I'a bien observé Raczinsky. L'intérieur a suscité chez tous les
critiques d'enthousiastes louanges, même chez ceux qui ne ménagent pas
leurs censures à Ludwig. Aussi bien l'architecture, chef d'oeuvre
classique dans ses profils
et dans ses lignes, que Ia décoration,
constituée par un splendide ensemble de marbres(1), font de I'église
une pièce admirable de beauté et de solennelle grandeur. Son plan est
celui d'une croix latine;
elle mesure 62,50
m de longueur et forme un
corps presque carré avec les chapelles laterales. On a prétendu qu'elle
était une copie réduite de St. Pierre de Rome.
Il y a, effectivement,
des analogies entre les deux églises,
mais il est certain, que, à cette
époque, on s'inspirait couramment de Ia Renaissance italienne. Deux corps
de bâtiment forment la façade couronnée par un fronton et flanquée de
tours où sont nettement appllquées les règles de Vignole.
Sur le tympan du fronton, est fixée une plaque de jaspe, travaillée en
relief et représentant le groupe de Ia Vierge,
de I'Enfant Jésus et de
S. Antoine, patrons de l'église.
Les tours, de 68 mètres de haut, comportent 5 étages: le
premier et le second, inspirés de Ia Renaissance de Vignole, contrastant
avec les autres qui appartiennent au baroque portugais du
XVIIIème
siècle, que Dieulafoy jugea particulièrement révélateur
/
104 / du tempérament portugais. Des
urnes
d'où s'échappent des flammes
décorent le cinquième qui est surmonté par des coupoles
à bulbe(2). Le
clocher du Nord contient 56 cloches et celui du Sud, 54; elles sont en
bronze et leur poids s'élève
à 217.000 kgs. De toutes ses cloches, 46 dans le clocher nord et 47
dans le clocher sud,(3) sont reliées aux
fameux carillons qui sont parmi les meilleurs du monde et uniques dans
Ia Péninsule. Exécutés à Anvers, ils fonctionnent manuellement ou automatiquement. On
ignore ce qu'ils ont coûté exactement et les calculs qui ont été faits
aboutlssent à des sommes variant de 1200.000 frs. or à 6 millions. Le
chiffre le plus probable doit être de 1.600.000 frs. or.
À ce propos, on
conte cette anecdote: Le roi Jean V avait commandé un seul carillon, et
le fabricant, pensant qu'il ne serait pas en état de payer, répondit
que le prix serait d'un million de cruzados (2 millions de francs
or). À cette impertinence le roi répondit: "Ce n'est pas cher, j'en commande
deux.»
Un vestibule précède l'église.
Il est orné de 22 statues de marbre de
Carrare de grandes dimensions et abritées dans des niches. Elles sont
toutes I'oeuvre de sculpteurs italiens et elles ont été sculptées en
Italie, de même que les 54 de I'intérieur et les 4 de Ia façade. Elles
représentent les fondateurs d'ordres religieuses, les apôtres, les
évangelistes et les docteurs de I'Eglise. Certaines,
comme celles de S. Vincent, de S. Bruno et de S. Sébastien, sont
considérées comme d'excellents travaux artistiques. Ce groupe de
sculpteurs constitue l'école italienne qui s'oppose à l'école portugaise représentée par les
autres oeuvres sculpturales, et surtout
par les retables des chapelles.
L'intérieur émeut par sa somptuosité et sa parfaite correction, li est
évident qu'en lui se reflète I'italianisme jésuite de l'église de Jésus de Rome. La nef est couverte d'une voûte en berceau. Le
long des parois, se dressent des pilastres couronnés par des
/
105 /
chapiteaux dont Beckford a dit qu'il n'en avait jamais vu de si
parfaitement travaillés. Dans les chapeIles latérales, se détachent les
retables et les médaillons de marbre de Carrare sculptés en haut relief
et représentant des scènes de Ia vie de Ia Vierge. Ce sont des
témoignages de I'activité de l'école de Mafra, fondée par Alexandre
Giusti (ou Justi). Au milieu du majestueux transept s'élève l'imposant
dôme et aux extrémités se trouvent les chapelles du Couronnement de Ia
Vierge et de la Sainte Famille, avec des retables en marbre de Carrare.
La première est fermée par une précieuse grille de
fer forgé et ciselé
avec des applications de bronze. Le dôme se compose de quatre parties:
te tambour, Ia coupole, Ia lanterne et Ia coupolette; il imite
celui de S.
Pierre de Rome en ce qu'il est doublé, c'est-à-dire constitué par deux
coupoles concentriques. C'est vraiment une grandiose et beIle
oeuvre
d'art parmi les meilleures du genre et il rehausse
la perspective de Ia
basilique. La lanterne fui creusée dans une seule pierre, mais, en 1765,
la foudre Ia détruisit en partie. La coupolette est monolithe. Du haut
de la lanterne, on jouit d'un admirable panorama, d'un immense horizon
jusqu'aux îles Berlengas du côté de Ia mer. Le tableau du grand autel
est l'oeuvre de Trevisani. C'est un travail exceIlent qui représente S.
Antoine adorant Ia Vierge.
Au-dessus, reposant sur le fronton, est placé
un énorme Crucifix de jaspe de 3
m de long, auréolé d'une Gloire,
oeuvre
du sculpteur José Almeida. Il faut signaler
aussi les orgues de bois du
Brésil avec garnitures de bronze doré, qui enchantèrent Lord Byron au
point de lui faire dire qu'ils étaient les meilleurs de tous
ceux qu'il connaissait. Jean V les fit construire en 1807 par I'arsenal de l'armée.
Avec les quatre du transept, l'église possède 6
orgues, cas unique au
monde.
À Ia sacristie, on voit un tableau digne de mention,
oeuvre de Inácio
Oliveira Bernardes, qui représente S. François et Ia Vierge.
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